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Je pense que le principal obstacle vient du fait que généralement le monde patronal a une vision négative de son personnel. Ce serait donc une minorité de patrons qui en ont une vision positive. D’après un certain Douglas McGrégor, expert en la matière, j’imagine, les premiers appliqueraient la théorie X et les deuxièmes la théorie Y. Voici en quoi consiste ces deux théories. La théorie X se rapporte aux tâches conventionnelles de la direction. Celles-ci concernent l’utilisation de l’énergie pour les besoins de l’entreprise.

La théorie X s’appuie sur trois hypothèses fondamentales:

Ces trois hypothèses sont complétés par cinq postulats;

Il semble bien que cette théorie considère l’homme comme un enfant et soit bâtie sur les “dix doigts utiles à l’usine” du passé. Cette théorie pouvait obtenir des résultats satisfaisants lorsque les hommes avaient pour but premier de satisfaire leurs besoins primaires. Elle était incapable de leur procurer la satisfaction des besoins d’ordre supérieur. C’est pour cette raison que MacGrégor propose une théorie appuyée sur des hypothèses plus en rapport avec la nature des hommes et leur motivation, la théorie Y. Elle se fonde sur les hypothèses suivants:

Ces méthodes consistent à fournir les moyens, à supprimer les obstacles, à encourager le développement et la formation, à guider les efforts. Tandis que la théorie X traite les hommes comme des enfants, la théorie Y les traite comme des adultes formés, conscients et responsables.

La théorie Y constitue le fondement de la direction participative par objectifs.

Je crois que le choix majoritaire de la théorie X pourrait s’expliquer par les problèmes qu’auraient eu le monde patronal durant des périodes que l’on pourrait qualifier de plein-emploi. Il y a vingt-cinq ans, j’ai été témoin de ce qui pouvait se passer dans une de ces périodes. Toutefois, pour le défense de mes confrères de travail de ce temps-là, je dois dire que les conditions de travail étaient très moyennes. En fait, il s’agit plutôt d’une caricature, tellement le climat de travail s’était détérioré. La facilité de se trouver un emploi ailleurs rendaient les travailleurs arrogants, indisciplinés et les contremaîtres devenaient des souffre-douleur. Des arrêts de travail et même des grèves étaient déclenchées pour des points mineurs.

Il me semble évident que pour les entreprises qui ont subi des épreuves semblables, la théorie X leur semble la plus plausible. Il me semble aussi évident que pour les patrons le plein-emploi leur apparaisse comme une calamité. Je ne suis donc pas surpris qu’un conseiller de Monsieur John Crow, gouverneur de la Banque du Canada en 1993 déclarait qu’un taux naturel de 6 à 8% de chômage est nécessaire simplement pour réduire les demandes d’augmentations de salaire.

Je ne suis pas surpris non plus d’en être rendu à soupçonner l’existence d’une concertation entre les gouvernements et le monde patronal en vue de maintenir ce taux de chômage bien supérieur à ce seuil déjà intolérable sur le plan humain en vue de faire baisser les salaires et transformer les emplois stables en emplois temporaires. Comme si ce n’était pas assez, cette concertation est allée jusqu’à restreindre l’accessibilité à l’assurance-emploi à seulement 36% de ceux qui avaient pourtant cotisé à 40%, je crois. Avec cette stratégie, les employeurs pensent avoir trouvé la potion magique pour que les salaires se rapprochent de plus en plus de ceux du tiers-monde parce qu’en plus de décourager les travailleurs à quitter un emploi même s’il ne leur convient pas, ils auront une banque de chômeurs qui seront prêts à accepter n’importe lesquelles conditions de travail. Pour mettre encore plus de pression sur les travailleurs, lorsque ceux-ci expriment leur mécontentement, ils menacent de fermer ou de déménager ailleurs.

Cette situation ne changera pas aussi longtemps que le monde patronal n’abandonnera pas la théorie X pour prendre la théorie Y parce que c’est lui qui finalement détient le pouvoir. Les gouvernements ne sont là que pour obéir à ses ordres par l’intermédiaire des lobbies qui emploient les moyens appropriés dépendamment si les politiciens réagissent aux pots-de-vin ou sous des menaces de toutes sortes. Une fois la volonté de ces lobbies exprimée au conseil des ministres, plus rien ne peut arrêter le processus de décision. En effet, rendue à cette étape cette volonté est protégée par la sacrée solidarité ministérielle et reconduite aux députés qui sont soumis à la ligne de parti. Il est très rare que des députés du parti au pouvoir osent voter contre le gouvernement. Par exemple, à Ottawa dans le débat sur l’hépatite C, quelques députés libéraux ont manifesté leur désaccord avec les hautes instances du parti. Un des leurs a pourtant osé dénoncer la concentration de pouvoirs sur la Colline Parlementaire en ces termes: <Les ministres accaparent le pouvoir et ils nous en enlèvent de plus en plus. Ils sont 18, 19 ou 20 qui semblent détenir tout le pouvoir et il n’y a pas de contre-poids dans le système. Les comités ont été neutralisés et maintenant, en créant ce scénario de vote de confiance, on met fin à la discussion>. Le vice-premier ministre au courant de ce désaccord de quelques députés a refusé de dire quelles mesures pourraient être prises à l’encontre des députés qui appuieraient l’Opposition. Ceci prouve que le jeune député du Lac St-Jean qui a sorti son siège du parlement avait raison d’affirmer que le pouvoir d’un député est inexistant devant la mondialisation des marchés. En résumé, la ligne de parti et la solidarité ministérielle ne sont qu’en fait le couloir du pouvoir du monde de la finance ou de l’argent.

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